vendredi 9 décembre 2011

L'enfer, c'est les autres

« Là ! là ! Je suis le miroir aux alouettes ; ma petite alouette, je te tiens ! »
- Jean-Paul Sartre, Huis clos

Je commence en me justifiant. Dans mon dernier billet, j’annonçais la fin du chapitre de l’analyse pour passer en mode « anecdotique ». Ce n’est pas tout à fait exact... Comme je ne peux m'empêcher de décortiquer et d’élucider compulsivement, mes billets seront donc un mélange des deux ; des tranches de vie tartinées d’une généreuse couche d’analyse à 5 cents.

Voilà, c’est dit, je suis soulagée et je peux dormir en paix. Heu mais pourquoi cette importante précision au juste ? Je parie que ce détail vous avait complètement échappé et surtout, que vous vous en moquez éperdument ! C’était plus fort que moi. J’étais convaincue d’avoir manqué de cohérence dans mes propos, faute grave pour tout manieur de plume qui se respecte. Je suis une blogueuse légitime seulement si j’ai votre approbation, parce que c’est dans votre regard que j’existe. Bienvenue dans mon enfer : les autres.

Bon, c’est un un peu lourd d’existentialisme tout ça mais j’exagère à peine, je vous le jure ! C’est tout à fait normal d’éprouver le besoin de plaire, sauf que quand il s’agit de la coiffeuse, du chauffeur d’autobus et du gars du dépanneur, on a un problème ! Combien de fois dans un contexte professionnel ai-je omis de donner mon opinion ou de prendre position sur un sujet de peur d'avoir l'air nouille devant mes collègues ? Sans compter les fois où je me suis laissé démolir par la critique d’un patron concernant un de mes projets. Et ces foutus courriels que j’ai relus deux, trois, quatre et même cinq fois avant d’appuyer sur le bouton Send ! Et le piéton à qui j’ai donné les mauvaises directions et que j’ai rattrapé à la course pour rectifier. Et la voisine à qui j’ai envoyé la main et qui m’a ignorée simplement parce qu'elle ne m'avait pas vue et dont le « non-geste » m'a rendu malheureuse. Et mon chum que j'ai harcelé quand il ne m'a pas adressé la parole parce qu’il était distrait ou fatigué : « Qu’est-ce qu’il y a ? », « Qu’est-ce que j’ai fait ? », « Tu es fâché ? », « Tu ne m’aimes plus ? ». Et quand j’ai décidé de rendre ce blogue public, seigneur... Un fois le lien publié sur Facebook, je me suis roulée en boule sous la table le coeur battant, refusant jusqu’au soir d’aller lire vos commentaires ! Des exemples comme ceux-là, j’en ai assez pour noircir les pages de dizaines de cahiers.

La dépendance à l’approbation des autres est un enfer sans fond et ce qui est décourageant dans mon cas, c’est qu’elle englobe tout le monde, même ceux qui n’ont aucune importance à mes yeux. Cette dépendance me pèse et j’ai envie de la jeter par la fenêtre ! Mais comment fait-on pour s’en foutre ? Pas complètement, juste un peu, au bon moment, avec les bonnes personnes. Comment fait-on pour doser ?

Et bien avant même d’apprendre à manier la dosette, je dois évaluer mon niveau d’exigence envers moi-même, qui, aux dires de la Psy, est complètement irréaliste. Comme je suis sans pitié à mon égard, j’ai besoin de l’approbation et surtout des éloges d’autrui pour me donner confiance. Si je ne l’obtiens pas, je déprime.

Soupir... C’est du gros boulot que d’arriver à se défaire d’une emprise comme celle-là. Tiens, pour me réconforter je vais relire Huis clos et ricaner en savourant les flèches venimeuses d’Inès à l’endroit de cette pauvre Estelle. Rire... ou bien pleurer ?

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