jeudi 15 mars 2012

Se tricoter une confiance

Les bérets du Mile End, les abribus réconfortants, le « yarn bombing » dans le métro et même le grand Gilles Renaud qui amène pelotes et aiguilles sur le plateau des Enfants de la télé... le tricot est partout ! Je ne suis pas en reste, puisque depuis un an, je me suis mise moi aussi au tricotage ou plus précisément au détricotage-retricotage. L’objectif derrière ce nouveau projet ? La confiance. Oui. Cette belle confiance en soi, toute en équilibre et en subtilité, qui demeure pour moi un concept insaisissable, une quête du Saint Graal. Si je la possédais, elle ferait mon bonheur et je pourrais enfin dormir en paix, au lieu de passer des nuits blanches à essayer de la fabriquer. Je peine, je besogne à la bâtir cette foutue confiance mais tout ce que je construis finit toujours par s’effondrer. Normal, quand on applique une couche de béton sur un château de cartes...

La Psy : Vous allez bien ?
Moi : Oui, oui...
La Psy : ...

Moi : Bon, en fait mon but est de... comment je dirais bien ça, ramasser des bouts de confiance qui traînent ici et là et faire un beau collage avec ça ?
La Psy : La confiance est un thème qui vous préoccupe, n’est-ce pas ?
Moi : Heu, ouais, c’est assez central à mon syndrome.
La Psy : Effectivement.
Moi : J’essaie... continuellement, éperdument, jusqu’à épuisement mais ça marche pas fort mon affaire.
La Psy : Vous essayez comment ?
Moi : Ben, je vis ma vie et en parallèle je me bâtis une confiance... genre dans mes temps libres ?
La Psy : Ha...

Figurez-vous que « se bâtir une confiance » n’est pas un hobby qu’on pratique quelques fois par semaine mais plutôt un projet totalement intégré au moment présent, sur lequel on bosse à tous les jours. Une aptitude, une force qu'on développe et qui s'acquiert au fil de chaque petite réalisation qui nous fait sentir bien et à notre place... Pas évident pour une imposteure de première, une perfectioniste finie qui ressasse continuellement le passé, angoisse sur le futur et oublie de vivre dans le présent.

La Psy : Vous tricotez ?
Moi : Euh non, pas trop mon genre. Je laisse ça aux mamies et aux hippies végétaliennes... Bon, j’ai peut-être déjà tricoté une fois, chez les soeurs, dans mon cours d’économie familiale, pourquoi !?
La Psy : Votre château de cartes, ça s’arrange.
Moi : ...
La Psy : En détricotant les mailles du passé et en les retricotant comme il faut.
Moi : Hallelujah ! Le Saint Graal, enfin à ma portée !

Défaire les mailles d’un long foulard mal tricoté avec lequel j’étais en train de me pendre et le refaire, génial ! Alors je me suis mise à détricoter en malade et à retricoter encore plus frénétiquement, sauf que ça n’a pas marché comme je voulais. J’ai défais trop de mailles, trop vite, je me suis empêtrée dans les fils, j’ai refais les mêmes rangées de mailles, encore tout croche. Et le maudit foulard, il était toujours aussi laid, plein de trous et de noeuds... Un bon matin, j’ai carrément décidé de le foutre à la poubelle et d’en créer un nouveau, tout beau et tout parfait. Mais au moment de le commencer, j’ai eu un blanc. Comment on fait pour partir du début, avec rien ?

Alors j’ai repêché le long foulard imparfait et je l’ai regardé, comme il faut. Pendant des semaines, voir des mois, je n’ai fait que le contempler sans même y toucher. Au bout d’un moment, j’ai fini par le voir autrement : un ouvrage complexe, confectionné de façon non-orthodoxe, voilà ! À chaque jour, je l’examine et je décide ce qui vaut la peine d’être détricoté et retricoté. Certaines sections restent intactes, témoins des erreurs du passé et rappel des gaffes à ne pas refaire, et de nouvelles viennent se greffer.

Même si je suis particulièrement fière des mauvaises mailles que j’ai récemment retricotées, j’avoue avoir un faible pour les nouvelles boucles, fraîchement entrelacées. De belles rangées de mailles encore difficiles à rabattre avec assurance mais que bientôt je croiserai les yeux fermés. Finalement, ça rock le tricot !




1 commentaire:

  1. Avoir des regrets, ce n'est pas sain. Rien n'arrive pour rien. C'est ça le destin. C'est cliché mais ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, plus aware (comme Jean-Claude Van Damme). ;)

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