vendredi 17 février 2012

Elle l'a

La dentiste qui a trois enfants, une clinique privée sur Monkland et qui travaille quatre jours/semaine, elle l’a. La princesse de Hampstead au volant de son Range Rover avec son latte et ses Ray-Ban, qui joue au tennis et qui s’assume, elle l’a. La designer qui pose dans le Elle Québec avec son bébé hypster, elle l’a. La jeune entrepreneure, l’animatrice télé, la publicitaire, la « Directrice »... elles l’ont toutes l’affaire.

Je suis entourée de filles qui ont tout pour elles et surtout, pour qui tout semble facile. D’abord, mes copines, qui mènent de brillantes carrières en plus d’être des blondes et des mères dévouées, des cordons bleus à faire pâlir d’envie Josée di Stasio, des sportives accomplies et des décoratrices dont les maisons pourraient se retrouver en page couverture du Chez soi et tout ça, sans sacrifier la pédicure ni la mise en pli !

Mais j’admire aussi de pures inconnues que je croise dans la rue ou que je vois à la télé et dans les magazines. Lors de mon dernier voyage à New York, j’ai passé une matinée au musée Guggenheim en comgagnie de mon chum. Alors qu’il se pâmait devant les toiles de Kandinski et Picasso, j’avais plutôt décidé de concentrer mon attention sur une jeune curatrice ; la parfaite new-yorkaise branchée du Upper West Side, impeccablement vêtue en Prada, Louboutins aux pieds et iPhone en main... J’étais bouche bée d’admiration. Elle n’était peut-être qu’une simple stagiaire sous-payée partageant un logement miteux avec cinq autres filles mais ce n’était pas l’image que j’avais décidé de m’en faire. Elle avait tout pour elle et je voulais être cette fille à la job de rêve et au bureau fermé avec vue sur Central Park ! Je suis devenue complètement obsédée, ayant même considéré m’inscrire au programme de maîtrise en histoire de l’art de l'université McGill... Et j’ai toujours un « modèle » en banque. Une fille au curriculum vitae exceptionnel que je google régulièrement en me disant « Ha, si j’étais comme ça ». Tiens, en ce moment ma saveur du mois est Anne-Marie Withenshaw. Mon dieu qu’elle l’a l’affaire... et elle n’a que 33 ans !

À mes yeux, toutes ces filles dégagent la confiance et le bonheur et réussissent mieux que moi. L’image de perfection et de facilité qu’elles projettent me remet en plein visage ma réalité de fille désorganisée, débordée et stressée. Il me semble que tout irait mieux pour moi si je leur ressemblais. Si j’avais un bac en droit, si mes cheveux avaient du volume, si mes dents étaient droites, si je roulais en MINI crème avec un toit ouvrant et si ma maison était rénovée, je serais en contrôle de ma vie. Si j’étais membre d’une association professionnelle et si je gagnais 90k par année, je serais capable de sortir mon portefeuille à l’épicerie sans déverser tout le contenu de mon sac à main sur le plancher plein de slush. Capable d'emmitoufler mes enfants dans leurs habits de neige tout en discutant intelligemment avec les autres mamans dans l’entrée de la garderie sans suer à grosses goûtes. Capable de préparer à chaque soir un souper savoureux et équilibré en 15 minutes. Capable de devenir « Directrice »...

C’est complètement dingue parce que quand on parle de « l’avoir l’affaire », j’ai tout : la santé, un toit au dessus de ma tête, l’amour de mon conjoint, de mes enfants etc. Mais ce n’est pas de ça dont il s’agit mais bien de « l’image ». Je suis prisonnière de l’image que je me fais des autres et de celle que me renvoie mon miroir : un brouillon.

Je sais pertinemment que quand je pars sur des dérapes de comparaison, je me fais du mal. Se comparer aux autres, c’est le début de la fin. C’est LA façon de se rendre malheureuse. Mais souvent, je trouve ça plus facile et plus réconfortant de me convaincre que si j’étais comme
« une telle » tout irait mieux... En tout cas, moins compliqué que de définir ce qui me rend heureuse et que de trouver ma place.







1 commentaire: